Le point sur les marchés financier octobre 2022

Vendredi 07 octobre 2022

Marchés Financiers

La conjoncture a continué de se dégrader dans les grandes économies avancées en septembre, de façon plus marquée en Europe qu’aux Etats-Unis. Les principales préoccupations des marchés se portent encore et toujours sur le niveau de l’inflation, les politiques monétaires des banques centrales, et les risques pesant sur la croissance. 

Zone Euro :

L’inflation atteint un nouveau record s’affichant à 10% en septembre contre 9,1% en août, au-dessus du consensus, tirée principalement par l’Allemagne. Dans ce contexte la conjoncture européenne a poursuivi sa dégradation, sur fond de prix du gaz très élevés et de craintes toujours vives concernant l’approvisionnement en énergie durant l’hiver. Du côté de l’activité, la chute des indicateurs du climat des affaires de la zone euro s’est amplifiée. L’indice PMI composite est passé de 48,9 à 48,2, s’enfonçant davantage dans la contraction (sous 50). La confiance des ménages a inscrit de nouveaux points bas record. Pour l’heure, cependant, le marché du travail est relativement épargné (taux de chômage toujours au plus bas depuis la création de la zone euro, à 6,6%). 
Sur le plan politique, les élections italiennes ont abouti à la victoire d’une coalition très marquée à droite, portée par le parti d’extrême droite FdI et sa dirigeante Giorgia Meloni. 
Enfin, à l’échelle européenne, les gouvernements ont tenté de se mettre d’accord sur une réponse coordonnée à la crise énergétique par la mise en place de nouvelles mesures votées par le Conseil exceptionnel du Transport des Télécommunications et de l’Energie :
- Plafonnement à 180€/MWh des revenus pour les producteurs d’électricité
- Objectif volontaire de réduction globale de 10% de la consommation brute d’électricité 
- Objectif obligatoire de réduction de 5% de la consommation d’électricité aux heures de pointe 
- Taxation des profits exceptionnels des entreprises pétrolières, gazières et charbonnières à hauteur d’au moins 33% 

Etats-Unis :

L’inflation ralentit moins que prévu en août (8,3%, après 8,5% en juillet), la baisse du prix de l’essence ayant eu moins d’effet qu’escompté. En effet, la force de l’inflation sous-jacente (6,3% sur un an et 0,6% sur le mois) montre que les pressions haussières sur les prix se diffusent à de nombreux secteurs. 

Le resserrement de la politique monétaire, pénalise certains secteurs (à commencer par l’immobilier) tandis que le niveau très élevé du dollar est également un frein. L’activité a donc continué de ralentir, tout en restant relativement soutenue. Ainsi les grands indicateurs du climat des affaires sont sur une dynamique descendante mais continuent de signaler une expansion. L’ISM1 manufacturier se rapproche encore un peu plus de la limite des 50 en septembre (à 50,9) et revient à son plus bas niveau depuis plus de deux ans. 
Du côté de l’emploi, les chiffres témoignent d’un marché qui demeure tendu (315k créations d’emploi contre un consensus à 298k, et de nombreux postes à pourvoir) néanmoins le taux de chômage a augmenté de manière inattendu atteignant 3,7% contre 3,5% précédemment. Les données de l’emploi du mois de septembre seront suivies de près par la FED. 

Chine :

En Chine, l’activité reste pénalisée par la persistance de restrictions anti-Covid et les difficultés du secteur immobilier. Alors que les données économiques confirment que la reprise de l’économie chinoise s’est poursuivie en août, les autorités ont de nouveau durci les conditions de circulation liées au Covid en amont du Congrès du Parti qui se tiendra mi-octobre. Toutefois, ces restrictions demeurent moins fortes qu’en avril/mai dernier.

RETOUR SUR LES PRINCIPALES CLASSES D’ACTIFS

Banques Centrales :

Le Conseil des gouverneurs de la BCE après avoir décidé à l'unanimité de relever les taux directeurs de 75 points de base, poursuit dans cette trajectoire incluant une communication résolument décidée à lutter avant tout contre l’inflation, même si cela doit être au détriment de la croissance. Compte tenu du niveau très élevé de l'inflation en zone euro, la BCE est donc déterminée à "concentrer" les hausses de taux et à "normaliser" rapidement les taux directeurs, et devrait maintenir une position très ferme dans les mois à venir.
Comme prévu, la Réserve fédérale américaine (Fed) a procédé à une troisième hausse consécutive de 75 points de base, portant le taux des fonds fédéraux à 3,25 %. En effet, le FOMC (Federal Open Market Committee) s'est engagé à relever le taux de manière agressive face aux pressions inflationnistes d'une économie qui est soutenue par un marché du travail très résistant et robuste. La Fed veut maintenant pousser les taux directeurs au-dessus de 4,5 % en 2023. 
L’annonce par le nouveau gouvernement britannique d’un budget très important, en soutien à la croissance a fait très fortement augmenter les rendements obligataires et a provoqué une notable fébrilité sur les marchés. La Banque Centrale d’Angleterre a alors été contrainte d’effectuer un demi-tour spectaculaire et a pris de court le marché en annonçant -alors en plein cycle de hausse de taux -qu’elle allait acheter des obligations de maturité longue jusqu’au 14 octobre.  

Taux :

Les marchés obligataires affichent toujours une volatilité extrême, et ont enregistré une hausse des rendements quasiment constante tout au long du mois de septembre. En effet, la détermination des Banques Centrales à prioriser la lutte contre une inflation qui n’a toujours pas atteint son pic, a poussé les investisseurs à réviser à la hausse leurs anticipations de taux.  Le Bund allemand à 10 ans a ainsi atteint 2.20% (soit +0.65% par rapport à fin août) tandis que les Treasuries US à 10 ans s’affichaient au plus haut à 3.90% (soit une progression de 0.70% sur un mois). L'écart de rendement entre les obligations souveraines italiennes et allemandes à 10 ans a terminé le mois à 2.40%, stable à l'approche des élections générales, qui n'ont pas offert de surprises majeures avec une coalition de droite largement en tête à l’issue du 1er tour. 
Cependant, la dynamique de marché a changé en ce début du mois d’octobre, les risques de récession reprennent le dessus sur les craintes inflationnistes et entraînent une forte diminution des rendements obligataires.  Le fiasco britannique, en mettant en avant les risques d’instabilité financière, a fortement pesé sur les anticipations de resserrement des banques centrales, les taux de ces dernières étant significativement revus à la baisse. Ainsi, les prix des obligations ont grimpé au principal motif que les banques centrales pourraient assouplir leur étreinte et tempérer leur élan dans leur course contre l’inflation, scénario cependant peu probable à nos yeux. Le marché des obligations privées, étant donné le risque croissant de récession, d'inflation élevée et de resserrement des politiques monétaires a également été pénalisé. Le volume des émissions est en baisse et les primes offertes sur le marché primaire sont en nette progression pour pouvoir attirer les investisseurs potentiels. La volatilité du marché devrait demeurer élevée, en raison de la saison des résultats d'entreprises qui pourraient être plus décevants que prévu et de l’incertitude actuelle sur la croissance et l’inflation. Nous maintenons donc une gestion prudente en conservant dans nos portefeuilles une sensibilité aux taux d’intérêt inférieure à celle de nos indices de référence et restons très sélectifs dans nos investissements sur les émetteurs privés.

Actions :

Depuis la mi-août, les interventions des banquiers centraux ont ancré dans l’esprit des investisseurs l’idée que les conditions financières devaient devenir plus restrictives, quoiqu’il en coûte pour l’activité. Dans ce contexte les marchés actions ont de nouveau enregistré pendant le mois de septembre des performances très négatives, sur fond de publications macro-économiques mal orientées : chiffres d’inflation records pour le mois de septembre en zone Euro, révisions à la baisse des prévisions de croissance mondiale de l’OCDE…  Mais également de publications micro-économiques qui pourraient faire craindre des révisions à la baisse quant aux anticipations de bénéfices. Citons par exemple l’avertissement de Fedex qui a annoncé des bénéfices opérationnels sous pression du fait de l’impact des confinements en Asie, de problèmes opérationnels en Europe, mais aussi de la faiblesse de l’activité aux Etats-Unis.
Ainsi sur le mois de septembre, les marchés d’actions de la zone euro baissent de -5,57% (Euro Stoxx 50), et ceux des Etats-Unis de -9,25% (S&P500 en devise locale) pénalisés notamment par la composante « croissance » qui souffre particulièrement de la hausse des taux d’intérêts. Au niveau sectoriel, les mouvements ont également été marquées avec une sous-performance notable des télécoms et de l’immobilier et une forte surperformance des ressources de base, de l’industrie pharmaceutique et des financières.
Malgré un pic de sentiment pessimiste historique de la part des investisseurs qui a favorisé un rebond technique début octobre, la volatilité des marchés d’actions reste très élevée. Et cette volatilité devrait rester de mise dans les prochaines semaines, en effet :
-    La pression liée aux politiques monétaires restrictives reste d’actualité,
-   Et les prochaines publications des résultats des entreprises pour le 3ème trimestre, même si elles restent de bonne facture, pourraient donner l’occasion de « guidance » (les indications données par les entreprises sur leurs anticipations de niveau d’activité et de résultats) négatives pour la fin d’année et pour 2023.
Dans ce contexte, nous conservons une exposition prudente aux marchés d’actions, avec une attention particulière aux prix de l’énergie qui reste un facteur déterminant pour cet hiver en Europe, ainsi qu’aux prochaines publications des résultats trimestriels. Sur les actions européennes nous continuons à privilégier les secteurs défensifs qui pourront résister dans un contexte inflationniste et de faible croissance. Enfin, nous restons positionnés sur les actions chinoises, en anticipation d’un soutien monétaire et budgétaire qui pourrait s’amplifier, voire surtout d’une atténuation de la politique « zéro Covid ».

1 L'ISM (Institute for Supply Management) manufacturier est un indice composite montrant l'évolution des conditions manufacturières aux Etats-Unis. L'indice est basé sur une enquête portant sur un échantillon de 300 directeurs d'achats de grandes entreprises, regroupant 21 secteurs d'activité sur tout le territoire national