Le point sur les marchés financiers novembre 2022

Lundi 14 novembre 2022

Marchés Financiers

L’économie mondiale continue de décélérer dans un contexte de forte inflation et de hausse des taux d’intérêt, auquel s’ajoutent les difficultés spécifiques de la Chine.

Zone Euro :

Les chiffres d’inflation pour le mois d’octobre ont de nouveau surpris à la hausse en atteignant 10,7% contre 10% le mois dernier sur un an, avec une inflation sous-jacente à 5,0%. Ce niveau étant principalement tiré par la France, l’Allemagne et l’Italie. Du côté de l’activité, la croissance économique du 3ème trimestre  a été légèrement supérieure aux attentes. Le PIB de la zone euro a progressé de 0.2% contre 0.1% attendu, en baisse par rapport au trimestre dernier (0.8%). En revanche, les chiffres plus récents des indices PMI1 ont signalé une contraction de l’activité, légère dans les services et plus marquée dans l’industrie. L'indice PMI composite est passé de 48,1 à 47,1 soit un niveau renforçant l'hypothèse d’une récession au quatrième trimestre. L’indice de confiance des consommateurs est quant à lui resté particulièrement faible malgré le taux de chômage au plus bas depuis la création de la zone euro. Du côté géopolitique, le Royaume-Uni a subi un mouvement de défiance des marchés vis-à-vis de sa dette souveraine, après l’annonce d’importantes mesures budgétaires et fiscales prévues par la première ministre Liz Truss. Ce mouvement de panique financier a conduit à l’intervention de la Banque d’Angleterre et à un changement de gouvernement. Lizz Truss a annoncé sa démission après 44 jours de mandat. Le Parti conservateur a élu un nouveau premier ministre, Rishi Sunak, dont la priorité est de rétablir « la stabilité économique et la confiance » au sein du pays. En Italie, Giorgia Meloni est devenue première ministre de l’Italie et s’est montrée prudente lors de ses premiers discours sur la position de l’Italie dans l’UE et la politique budgétaire. Enfin, la commission européenne a dévoilé de nouvelles mesures pour limiter les prix et assurer l’approvisionnement énergétique (ex : achats communs de gaz entre Etats membres afin de négocier les meilleurs prix, mise en place d’un mécanisme de correction des prix du gaz avec un plafond temporaire…).

Etats-Unis :

Aux Etats-Unis, les chiffres d’inflation de septembre et la résilience du marché de l’emploi confirment le durcissement monétaire de  la FED. En effet, l’inflation a moins ralenti  que prévu en septembre, à 8,2% sur 12 mois (après 8,3% en août), l’inflation sous-jacente accélérant, au contraire, à 6,6% sur 12 mois contre 6,3% le mois précédent, soit sa plus forte hausse depuis 1982. Du côté de l’emploi, le dernier rapport de septembre indique un marché qui demeure robuste avec 263 000 emplois créés (consensus à 255 000). Ce chiffre demeure très élevé mais constitue néanmoins un plus bas depuis janvier. L’élément le plus surprenant fut la baisse du taux de chômage : 3,5% contre un consensus de 3,7%. L’activité économique est restée vigoureuse tout en ralentissant progressivement sous le double effet de l’inflation très élevée et du resserrement monétaire. Publiés fin octobre, les chiffres de la croissance du 3ème trimestre  ont fait état d’un rebond du PIB de 2,6% (en rythme annualisé) par rapport au 2ème trimestre. Cependant, cette hausse (après deux trimestres négatifs) intègre une forte contribution positive du commerce extérieur alors que la consommation n’a progressé, sur la même période, que de 1,4%. Par ailleurs, les indices ISM2 portant sur le mois de septembre ont été mitigés, signalant un climat des affaires toujours élevé dans les services, mais un repli sur un rythme de quasi-stagnation dans l’industrie.

Chine :

En Chine, l’élément majeur de ce dernier mois fut le 20ème Congrès national du Parti communiste, qui s’est tenu du 16 au 22 octobre dernier. Sans surprise, le Président Xi Jinping a été reconduit pour un troisième mandat de 5 ans. Les 7 membres du Comité ont été dévoilés, 4 nouveaux étant des proches de Xi Jinping, ce dernier renforce encore une fois sa position au sein du parti. Du côté de l’activité, la croissance du PIB s’est accélérée et les données de production sont également ressorties en hausse. Toutefois, la consommation et la confiance des industriels se sont avérées plus faibles qu’attendues (indices d’activité PMI officiels sous le seuil de 50). L’économie chinoise reste en effet particulièrement affectée par les restrictions sanitaires dans le cadre de la stratégie « zéro-Covid ». Malgré les espoirs des investisseurs, les autorités ont de nouveau réaffirmé leur volonté et la nécessité de maintenir leur stratégie « zéro-Covid » alors que le pays fait face à un nouveau pic de contamination ces derniers jours.

RETOUR SUR LES PRINCIPALES CLASSES D’ACTIFS

Banques Centrales :

Le 27 octobre, la BCE a une nouvelle fois relevé fortement ses taux directeurs (+0,75%), portant ainsi le taux de rémunération des dépôts à 1.50%. L’ajustement un cran plus prudent de la communication et l’absence d’éléments clairs quant à la réduction de sa détention d’obligations ont cependant provoqué une nette détente des taux souverains. Avant de diminuer son stock d’obligations, la BCE a opté pour une réduction de la taille du bilan via des remboursements anticipés des TLTRO III (des opérations de refinancement bon marché offerts aux banques depuis 2019). En effet, les conditions d’octroi de ces prêts ont été considérablement durcies et les taux d’intérêt payés par les banques seront plus élevés à partir du 23 novembre.  Plusieurs dates de remboursement anticipé, assez proches dans le temps, ont été annoncées avec pour objectif de réduire le bilan de la Banque Centrale et de faciliter la transmission de la politique monétaire.

La Réserve fédérale américaine a également relevé le 2 novembre son principal taux d'intérêt de 0,75% fixant ainsi un objectif des Fed Funds compris entre 3.75% et 4%, toujours dans le but de freiner l'inflation qui demeure son objectif prioritaire. Du communiqué de presse et du discours de Jérôme Powell, il ressort que la vitesse de la remontée des taux sera plus modérée ces prochains mois mais qu’elle sera sûrement plus longue, rien n’étant alors certain sur leur niveau final. Tout dépendra de l'impact sur l'économie des hausses passées et des prochains indicateurs d'activité, l'inflation et l'emploi. En clair, la Fed s’oriente vers des hausses de taux de moindre ampleur mais pour une période plus longue, avec l’idée qu’il vaut mieux en faire trop que pas assez en matière de restriction monétaire pour bien ancrer les anticipations d’inflation.

De nombreuses autres Banques Centrales (Angleterre, Australie, Norvège, Canada …) ont également poursuivi leur politique de hausse des taux mais dans l’ensemble leur discours s’oriente vers des hausses de taux plus modérées à l’avenir, le resserrement effectué étant déjà substantiel.

Taux :

Les marchés obligataires ont encore fait preuve d’une très forte volatilité au cours de la période récente pendant laquelle des phases de baisse des rendements se sont succédées avec des phases de hausse. Le rendement du Bund à 10 ans (emprunt d’Etat allemand) a ainsi évolué dans une fourchette comprise entre 1.95% et 2.50% pour s’établir aujourd’hui autour de 2.25%. Aux Etats-Unis, les rendements souverains se sont nettement redressés depuis le comité de politique monétaire du 2 novembre, le T-notes 10 ans (emprunt d’Etat US) atteignant dorénavant 4.15%. Cette tension sur les taux US a été plus marquée sur le segment court, provoquant ainsi un aplatissement supplémentaire de la courbe des rendements souverains : les taux à 2 ans dépassent de 0.55% ceux à 10 ans. Sur le marché des obligations privées, le marché primaire demeure relativement calme et les primes d’émission proposées sont toujours élevées, soutenant ainsi l’appétit pour le crédit (les obligations d’entreprises) comme en témoignent les taux de sursouscription et la bonne performance des nouvelles émissions. Les spreads de crédit (supplément de rendement proposé par les émetteurs privés par rapport à une référence monétaire) se sont bien resserrés au cours de ces deux dernières semaines entrainant une amélioration de la performance de cette classe d’actif.

La manque de visibilité sur la crise énergétique et sur l’évolution de l’inflation nous conduisent à maintenir une gestion prudente en conservant dans nos portefeuilles une sensibilité aux taux d’intérêt légèrement inférieure à celle de nos indices de référence et à rester très sélectifs dans nos investissements sur les émetteurs privés.

 

Actions :

Face à une inflation toujours en hausse, les Banques Centrales continuent d’accentuer leur politique restrictive et durcissent les conditions financières du marché. L’activité économique continue par ailleurs de présenter des signaux d’affaiblissement et les performances sur les marchés actions sont négatives depuis le début de l’année avec une volatilité importante. Néanmoins les publications microéconomiques de ces dernières semaines ont contribué à un rebond significatif, en particulier sur les marchés européens.

Ainsi, fin octobre, plusieurs résultats trimestriels d’entreprises étaient attendus aux Etats-Unis et en Europe. Ils ont été globalement positifs, et compte tenu d’un positionnement très prudent des investisseurs, cela a suffi à faire repartir les marchés actions à la hausse.

Notons cependant que les géants de la technologie américaine tels que Microsoft et Alphabet ont déçu par leurs publications et plus globalement les « GAFAM » qui ont inscrit des résultats décevants, ce qui s’est notamment traduit par une nette sous-performance de l’indice Nasdaq et souligne que l’impact du ralentissement de l’économie sur les profits générés par les entreprises est en cours.

Les marchés d’actions sont donc en hausse depuis la mi-octobre, et l’Euro Stoxx 50 réalise sur un mois glissant (du 8/10 au 08/11) une performance de 10,84% alors que sur la même période le S&P 500 progresse de +5,25% (en devise locale). Du côté des performances sectorielles, on constate une sous-performance des secteurs des Télécommunications, Utilities et Technologies, notamment due aux publications trimestrielles contrastées. Les secteurs les moins cycliques tirent leur épingle du jeu.

Nous pensons que la hausse récente sur les marchés actions a également reflété l’espoir des investisseurs de voir un ralentissement du rythme des hausses de taux des banques centrales ainsi qu’une amélioration des conditions de la politique « zéro-covid » en Chine.

Dans un tel contexte, nous continuons de penser que les révisions à la baisse des anticipations des résultats des entreprises pour 2023 – particulièrement en Europe – reste un risque mal apprécié par les marchés à l’heure actuelle. Par ailleurs, suite au Congrès national du Parti communiste, les conditions pour une amélioration de l’activité en Chine ne nous semblent pas encore réunies. Ainsi, nous conservons une position légèrement prudente sur nos expositions actions au global, et nous avons décidé de couper notre position sur les actions chinoises et de revenir sur les actions américaines. La valorisation des actions américaines reste élevée selon nous, mais la révision à la baisse des anticipations de résultats pour 2023 a déjà démarré, et les risques sur la croissance nous semblent moins marqués. Nos choix sectoriels restent axés sur les secteurs défensifs et certains secteurs bénéficiant de la hausse de prix.

  

1L’indice PMI, pour “Purchasing Manager’s Index” (indice des directeurs des achats), est un indicateur permettant de connaître l’état économique d’un secteur.

2L'ISM (Institute for Supply Management) manufacturier est un indice composite montrant l'évolution des conditions manufacturières aux Etats-Unis. L'indice est basé sur une enquête portant sur un échantillon de 300 directeurs d'achats de grandes entreprises, regroupant 21 secteurs d'activité sur tout le territoire national.