Le point sur les marchés financiers novembre 2023

Vendredi 10 novembre 2023

Marchés Financiers

En octobre, les données économiques américaines ont continué de surprendre positivement, tandis que celles de la zone euro sont restées décevantes. La Chine a affiché une croissance solide au troisième trimestre parmi les économies émergentes.

L’inflation, pour sa part, a davantage reflué en zone euro qu’aux Etats-Unis. Sur les marchés, les rendements obligataires ont connu une forte hausse avant de reculer, tandis que les marchés actions ont poursuivi leur correction.

D’un point de vue géopolitique, la vigilance demeure nécessaire surtout que, pour l’heure, les investisseurs financiers n’ont pas intégré de prime de risque majeure, comme le souligne l’évolution des cours du pétrole qui restent autour de 85 $ le baril. L’attention portée par les Etats-Unis et plusieurs autres grandes puissances diplomatiques sur le conflit entre Israël et le Hamas contribue à limiter le risque d’escalade, un élément qui restera essentiel pour permettre une éventuelle poursuite du mouvement d’appétit pour le risque.

 

Zone Euro :

En octobre, la situation économique de la zone euro reste caractérisée par une faible dynamique. Les indicateurs du climat des affaires continuent de signaler un déclin de l'activité, avec une contraction plus marquée dans le secteur industriel par rapport aux services. Les chiffres de croissance économique du troisième trimestre ont montré un léger recul du PIB de la zone euro par rapport au trimestre précédent, avec des variations entre les pays, notamment une progression tangible en Espagne, une légère croissance en France, une stagnation en Italie et un léger recul en Allemagne.

Les enquêtes menées dans le secteur bancaire révèlent également une réduction de l'offre et de la demande de crédit. En contraste, l'inflation a été un point positif, avec une augmentation de l'indice général des prix sur 12 mois de seulement 2,9 % en octobre, bien en deçà des prévisions, marquant une nette baisse par rapport aux 4,3 % enregistrés en septembre. De plus, l'indice sous-jacent a continué à décélérer, atteignant 4,2 % après avoir atteint 4,5 % en septembre.

 

Etats-Unis :

L’économie américaine envoie des signaux contrastés. Ainsi, les dernières données du marché du travail attestent d’un tassement plus notable qu’attendu des créations d’emplois d’autant que les deux mois précédents ont été revus à la baisse, permettant ainsi aux pressions salariales de s’essouffler. Les résultats de cette enquête ont été bien accueillis par les marchés car conformes aux attentes de la FED dans sa lutte contre l’inflation.

D’un autre côté, les chiffres de croissance économique du troisième trimestre ont indiqué une forte accélération, avec une progression du PIB de 4,9 % en rythme annualisé par rapport au deuxième trimestre, principalement soutenue par la vigueur de la consommation.

De plus, malgré la hausse marquée des taux d'intérêt, le marché immobilier a continué d’afficher une bonne résistance. Cependant, le climat des affaires est resté négatif dans l’industrie. Les données d'inflation de septembre ont été mitigées, avec une augmentation de l'indice général des prix sur 12 mois à 3,7 %, tandis que l'indice sous-jacent a continué de ralentir, atteignant 4,1 % après avoir atteint 4,3 % en août.

 

Chine :

L’économie chinoise a progressé de 4,9% en glissement annuel au troisième trimestre, plus rapidement que ce qu’attendait le consensus (4,5%). La production industrielle de septembre a également augmenté, ce qui laisse penser que les récentes mesures politiques sont en train de stimuler l’économie.

Par ailleurs, les autorités ont approuvé un budget supplémentaire du gouvernement central de 1000 mds de RMB (0,8% du PIB) pour 2023, augmentant le déficit du gouvernement central de 3% à 3,8%. 500 mds de RMB seront dépensés au quatrième trimestre, tandis que la moitié restante sera consacrée au premier semestre 2024. L’économie reste néanmoins confrontée à des vents contraires. Notamment, par le fait que la crise de l’immobilier demeure un sujet de préoccupation majeur.

 

Banques Centrales :

La BCE démarre sa pause. A l’unanimité, elle a décidé le 26 octobre dernier de maintenir ses outils inchangés, aussi bien ceux qui sont conventionnels (les taux directeurs) que non conventionnels (c’est à dire relatifs à la gestion de son bilan). Le taux de rémunération des dépôts a ainsi été reconduit à 4%. Cette « pause » tant attendue après 10 réunions consécutives de hausse des taux directeurs marque un tournant pour l’institution. Son argumentaire expliquant l’amélioration en cours et à venir de l’inflation a été très clair, en se fondant notamment sur la transmission de la politique monétaire et la faiblesse de la croissance. Cependant, de nombreux membres de l’institution ont pris la parole pour rappeler que cette pause restait conditionnée à un retour de l’inflation vers la cible de 2% et qu’il était encore beaucoup trop tôt pour envisager une baisse des taux directeurs.

De son côté, lors de son comité de politique monétaire du 1er novembre et comme anticipé par les marchés, la Fed a gardé sa fourchette cible de taux directeurs inchangée à 5,25/5,50%. La conférence de presse de Jérôme Powell a principalement souligné le durcissement des conditions financières observé récemment avec la forte hausse des taux longs, ce qui devrait peser sur l’activité et qui rend nettement moins nécessaire d’éventuelles autres hausses de taux directeurs. La hausse des taux obligataires (+0,65% en 2 mois sur le 10 ans souverain) a eu l’effet d’un resserrement monétaire, via le durcissement des conditions de financement, sans que la Fed ait, à ce stade, besoin d’agir de manière supplémentaire. Jerôme Powell est évidemment resté prudent en disant que « le processus de désinflation sera cahoteux mais on sent nettement moins d’anxiété qu’il y a quelques mois ». La Fed semble donc considérer aujourd’hui que les taux directeurs sont suffisamment restrictifs afin d’alimenter la désinflation et atteindre son objectif de 2%. L’enquête trimestrielle du crédit menée auprès des banques américaines a d’ailleurs confirmé la poursuite du durcissement des conditions d’octroi pour quasiment tous les types de crédits au troisième trimestre 2023, et de la réduction de la demande de tous les types d’emprunteurs.

K. Ueda, le gouverneur de la Banque du Japon a évoqué le retour d’une politique monétaire moins accommodante et la fin des taux directeurs négatifs. Le gouverneur reconnaît que la banque centrale s’approche de plus en plus de l’atteinte de son objectif d’inflation à 2%, notamment grâce aux négociations syndicales sur les salaires pour l’année 2024 qui débutent tout juste.

 

Taux :

Après un pic atteint le 19 octobre à près de 5% aux Etats Unis et 3% en Allemagne, les rendements souverains à 10 ans ont enregistré une forte baisse qui se renforce encore en début novembre.

La détente des taux s’explique par des statistiques américaines compatibles avec un ralentissement de l’activité et des prix, ainsi que par les décisions des banques centrales de maintenir leurs taux directeurs inchangés. En effet, les investisseurs anticipent désormais la fin du cycle de relèvement des taux des Banques Centrales. De plus, aux Etats-Unis, la pression sur les taux longs s’est allégée après la publication du programme d’émission du Trésor pour le prochain trimestre, les montants étant moins importants qu’initialement attendu.

La baisse des taux a été plus marquée sur les échéances longues, les maturités courtes étant bien plus stables en lien avec le maintien des taux directeurs annoncés. Ainsi, le rendement du Bund allemand à 10 ans s’inscrit à 2,65% et son homologue américain à 4,53% au 9 novembre. Après plusieurs semaines difficiles, le marché du crédit a nettement rebondi en bénéficiant de la décision de la Fed de faire une pause dans le cycle de resserrement monétaire, mais également grâce au reflux associé des taux souverains.

Enfin, les résultats d’entreprises se sont montrés résilients, rassurant les investisseurs. Dans nos portefeuilles, nous nous inscrivons toujours avec une duration supérieure à celle de nos indices de référence. Quant au positionnement géographique, nous sommes surpondérés sur les obligations souveraines américaines, espagnoles et portugaises et maintenons notre exposition sur la dette émergente. Enfin, nous conservons une attitude prudente sur les obligations privées en étant sélectifs sur la qualité et la liquidité de l’émetteur, mais souhaitons tout de même bénéficier du portage attractif de cette classe d’actif.

 

Actions :

La tendance baissière des marchés d’actions, entamée début août, s’est poursuivie jusqu’à la fin du mois d’octobre, accentuée par la hausse sensible des rendements obligataires observée sur les marchés développés (particulièrement aux Etats-Unis) intervenue à partir de septembre. Le repli brutal de ces rendements début novembre a logiquement entrainé un rebond marqué des marchés d’actions. Sur l’ensemble de la période écoulée depuis le 13 octobre, les performances des principaux indices actions calculés en devises locales s’échelonnent de -2,6% pour l’indice britannique FTSE 100 à +1,8% pour l’indice américain des valeurs technologiques NASDAQ Composite. L’indice pan-européen STOXX Europe 600 est quasiment inchangé. Celui de la zone euro (EURO STOXX) a progressé de 0,8%.

 

En Europe, le secteur de l’énergie a été pénalisé par la baisse du prix du pétrole entamée fin septembre et qui s’est accélérée tout récemment. L’indice STOXX 600 Oil & Gas abandonne 5,3% sur la période. Ce sont les secteurs des biens de consommation et de l’immobilier qui affichent les meilleures performances (+4,6% pour leurs indices respectifs). L’indice européen des valeurs technologiques se distingue également, à l’instar de son homologue américain le NASDAQ (+4,4% pour l’indice STOXX 600 Technology).

 

Dans ce contexte, nous conservons un positionnement prudent vis-à-vis des actions pour lesquelles nous voyons toujours un potentiel de dépréciation dans les mois qui viennent, dans l’anticipation d’un ralentissement marqué de la croissance économique des pays développés et par voie de conséquence, d’une révision en baisse de la capacité bénéficiaire des entreprises pour les prochains trimestres. Les données macroéconomiques et microéconomiques publiées récemment commencent à montrer des signes de faiblesse (indices PMI1 en zone de contraction tous secteurs confondus, chiffres d’affaire publiés par les entreprises au troisième trimestre en dessous des attentes). La baisse récente des rendements obligataires pour les maturités lointaines (10 ans et plus) conforte le sentiment que ce ralentissement est anticipé par les marchés. Ce que les investisseurs ont traduit comme une bonne nouvelle pour les actions dans un premier temps pourrait donc se révéler négatif dans les prochaines semaines.

1PMI, pour Purchasing Managers Index, est un terme générique pour désigner des indices établis à partir d’enquêtes mensuelles auprès des directeurs d’achat des grandes entreprises des principales économies mondiales.