Marchés Financiers
13/05/2022 : Le point sur les marchés financiers mai 2022
Alors que le conflit russo-ukrainien perdure, les conséquences sur l’économie mondiale apparaissent. Les augmentations des prix de l’énergie ne cessent d’alimenter l’inflation qui atteint de nouveaux points hauts et se diffuse à toutes les composantes. Les banques centrales sont ainsi contraintes d’accélérer leurs perspectives de resserrement monétaire.
Zone Euro :
En Europe, la guerre s’enlise et les négociations n’aboutissent pas. Les chiffres du PIB du premier trimestre ont fait état d’une faible croissance (+0,2% par rapport au T2, intégrant une légère progression en Allemagne et en Espagne, une stagnation en France et une contraction en Italie). L’activité a, en effet, été freinée en tout début d’année par les restrictions liées au Covid, puis par la compression des revenus réels due à la flambée des prix de l’énergie, exacerbée par la guerre. Les chiffres de l’inflation ont atteint de nouveaux records affichant +7,5 en avril et une inflation sous-jacente à +3,5% (vs 3% en mars). Les anticipations d’inflation et l’effet de la hausse des prix sur la croissance aggravent les inquiétudes de la BCE.
Etats-Unis :
Aux Etats-Unis, la publication du PIB du premier trimestre a surpris à la baisse, affichant -1,4% par rapport au dernier trimestre 2021 (en rythme annualisé). Ce repli est largement dû à une forte hausse des importations, tandis que les moteurs domestiques de l’activité ont bien résisté, en particulier la consommation des ménages. Concernant le marché du travail, son amélioration se poursuit avec un taux de chômage affiché à 3,6% soit quasiment au niveau d’avant Covid (3,5%). L’inflation totale marque le pas ce mois-ci avec une légère baisse affichée mais demeure très élevée. Elle est affichée à 8,3% en avril contre 8,5% en mars avec une inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation) qui passe de 6,4% à 6,2%. Ce sont désormais les dépenses en services qui augmentent stimulées par la réouverture post-Covid. Dans ce contexte, la FED a clairement communiqué son intention de relever vigoureusement ses taux directeurs et de rendre les conditions de politique monétaire moins accommodantes.
Chine :
En Chine, la politique de zéro Covid continue et provoque l’inquiétude des investisseurs concernant ses conséquences sur la croissance mondiale. Les chiffres du PIB du premier trimestre sont ressortis au-dessus des attentes à 4,8% vs 4% au trimestre précédent. Néanmoins, l’indice PMI manufacturier atteint 47,4 en avril après 49,5 en mars. Toutes les composantes sont en baisse. Les mesures de confinements successifs pèsent sans surprise sur l’activité du mois d’avril.
RETOUR SUR LES PRINCIPALES CLASSES D’ACTIFS
Banques Centrales :
Le cycle de hausse des taux est définitivement lancé cette année avec de nombreuses banques centrales qui emboitent le pas de la Fed (Inde, Grande-Bretagne, République Tchèque, Pologne, Brésil…). Ce cycle de resserrement était largement attendu. Les inconnus sont désormais de deux ordres : la vitesse de remontée des taux et le niveau final. Sans surprise, la Fed a relevé le 4 mai de +0.50% ses taux directeurs, dans la fourchette 0,75%-1% et a évoqué d’autres hausses de 0.50% lors des deux prochaines réunions. J. Powell a confirmé qu’un retour « rapide vers une politique monétaire neutre » est toujours visé afin de freiner la demande et tout l’enjeu porte sur le niveau des taux directeurs que cela implique. Les marchés anticipent dorénavant une poursuite assez agressive du resserrement monétaire qui porterait le taux des Fed Funds à 2.70% en fin d’année. Les prises de paroles des membres de la BCE s’additionnent en faveur d’une sortie rapide de leur politique accommodante. Le gouverneur de la BDF, F. Villeroy de Galhau, a ainsi rappelé sa position favorable à un retour des taux de dépôts en territoire positif d’ici la fin de l’année, ce qui signifierait procéder à trois hausses de taux directeurs d’ici là, et Christine Lagarde a validé l’idée d’une hausse des taux directeurs dès le mois de juillet. L’institution reste confrontée à des risques inflationnistes haussiers du fait de la guerre en Ukraine et des sanctions qui ont été imposées. Le risque d’agir trop tard se renforce, et l’objectif de lutte contre l’inflation l’emporte plus que jamais sur les risques sur la croissance.
Taux :
Les marchés obligataires ont connu un nouvel épisode de forte volatilité soulignant ainsi leur fragilité, entre les implications d'un resserrement agressif des politiques monétaires sur fond d'inflation et la détérioration des perspectives de croissance. Néanmoins, les inquiétudes sur la normalisation des politiques monétaires ont favorisé une nouvelle correction à la hausse des rendements. Ainsi, suite à la réunion de la Fed, les craintes des investisseurs financiers ont refait surface, portant le taux souverain américain à 10 ans bien au-dessus du seuil de 3%, depuis les craintes pesant sur la croissance ont permis un recul de celui-ci à 2.85%. Il est à noter que la remontée récente des taux américains a surtout été portée par la hausse de la partie réelle (c’est-à-dire des taux nominaux corrigées des anticipations d’inflation), ceci témoigne des craintes des investisseurs que la Fed ne soit obligée de recourir rapidement à une hausse plus forte. La tendance observée sur les marchés obligataires de la zone euro a été semblable à celle décrite aux Etats-Unis, le rendement souverain allemand à 10 ans, le Bund a dépassé le niveau de 1% avant de revenir plus récemment vers 0.85%. Au total, l’augmentation des taux du Bund traduit en grande partie un nouveau renforcement des anticipations de hausses de taux de la BCE, une évolution logique au vu des signaux assez explicites dans ce sens, envoyés par plusieurs membres du Conseil des gouverneurs. Du côté des pays périphériques, les titres italiens ont de nouveau sensiblement sous-performé, la différence de taux BTP-Bund à 10 ans s’est ainsi écartée jusqu’à 2,05%, soit son niveau le plus élevé depuis 2 ans. Enfin sur le marché des obligations privées, les inquiétudes sur les perspectives de croissance ont poussé les spreads à un écartement sur les différentes classes d'actifs. Le marché primaire a été peu actif en avril avec seulement 9 Mds€ d’émissions sur le segment des entreprises non-financières Investment Grade euro (contre 44 Mds€ en mars) et 2,9 Mds€ d’émissions sur le Haut Rendement euro (contre 3,3 Mds€ en mars). L’évolution des marchés obligataires restera négative tant que l’inflation ne montrera pas de signaux de stabilisation, voire de baisse rapide et que les banques centrales n’auront pas fait leur preuve en remontant suffisamment leurs taux directeurs. La très grande incertitude environnante appelle à la prudence en raison de la fragilité de la situation, nous maintenons dans nos portefeuilles une sensibilité au taux d’intérêt inférieure à celle des indices de référence et restons très sélectifs dans nos investissements sur les obligations privées.
Actions :
Les annonces successives de hausse des taux directeurs ont pesé fortement sur les valorisations des marchés actions à travers la hausse des taux longs. Sur le mois écoulé, les indices actions – en devise locale - sont en baisse, de l’ordre de 5% en Europe et jusqu’à 15% pour l’indice Nasdaq 100 (valeurs technologiques), plus impacté par la remontée des taux obligataires. La volatilité a été encore plus forte au sein des secteurs où la rotation vers les valeurs pétrolières et défensives s’est poursuivie en défaveur des valeurs technologiques. Du côté des émergents, les craintes sur la croissance se sont accentuées avec le renforcement des confinements en Chine où le gouvernement réitère sa stratégie de zéro-Covid qui pèse sur l’activité. La forte baisse des indices émergents et chinois est le reflet des craintes sur la croissance mais aussi sur les pressions inflationnistes à venir à travers des chaines de production à nouveau perturbées. Dans cet environnement, les seules hausses sont du côté des matières premières et du dollar qui se renforce face à l’ensemble des devises.
Du côté des entreprises, les résultats du 1er trimestre ont mis en exergue une bonne résilience des croissances bénéficiaires des sociétés en Europe mais aussi aux Etats-Unis. Néanmoins, l’analyse sectorielle confirme les tendances de cette année, à savoir qu’une grande partie des résultats ont été portés par les valeurs énergétiques et pétrolières ce qui rend fragile les attentes pour le reste de l’année et renforce le risque de révision à la baisse pour les prochains trimestres.
Dans cet environnement complexe à court terme, nous maintenons notre prudence sur les actions tout en favorisant la diversification géographique et sectorielle. Nous privilégions les valeurs qui arrivent à amortir la hausse des coûts des intrants et maintenir leurs marges, dont certains secteurs défensifs comme celui de la santé. Nous maintenons nos diversifications sur les secteurs des ressources de base qui bénéficient de la hausse des prix de l’énergie. Au niveau géographique, nous conservons notre diversification sur les Etats-Unis, qui subissent moins directement le choc d’incertitude lié à la guerre en Ukraine.
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